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Hommage
Jean-Philippe Allard, le "patron chéri"

La carrière de Jean-Philippe Allard est toute entière dédiée à la musique : directeur artistique, producteur, manager et éditeur, cet insatiable mélomane, féru de jazz, lui a consacré sa vie. Couronné Grand Prix Sacem de l'édition musicale en 2012, il est aussi élu membre de son Conseil d’administration en 2017. Jean-Philippe Allard est décédé à l'âge de 67 ans.

Qu’il fasse vibrer l’histoire à travers ses rééditions de Miles Davis ou Art Blakey, stimule l’émergence de la world music ou transforme Polygram en une chapelle culte du jazz moderne, Jean-Philippe Allard a été présent d’un bout à l’autre de la filière. Il a traversé l’univers classique puis la chanson et le rap avec la même ferveur.

Originaire de Saint-Mandé, Jean-Philippe Allard a été vendeur de disques à la Fnac avant d’être à la tête de l'un des labels les plus prestigieux et de devenir l'un des maillons essentiels du secteur de la musique en France, particulièrement dans la famille du jazz.

En 1987, alors qu'il est commercial au bureau de Polygram à Nancy, une proposition marque sa vie. Celle de Marc Lumbroso, ténor de la production et de l’édition. Grâce à lui, il devient directeur du pôle Jazz de Polygram France. "Aimer le jazz à notre époque, ce n'est pas n'importe quoi : c'est aimer les musiciens, avoir avec eux des rapports différents", dit de lui la chanteuse Juliette, avec qui il collabore plus tard. En dix ans, Jean-Philippe Allard devient une référence et, surtout, place le jazz sur la carte de l'un des plus prestigieux labels de l'Hexagone. Il signe des artistes qui écrivent avec lui l'histoire du genre : Randy Weston, Dee Dee Bridgewater, Christian Escoudé, Ornette Coleman, Abbey Lincoln et des dizaines d’autres.

« Humain, intelligent, passionné »

Après avoir été pendant deux ans, en plus de la section jazz, à la tête de Polygram Classique au sein de cette maison de disque - devenue entre-temps Universal Music France - Jean-Philippe Allard est nommé en 1998 à la Direction Générale du label Polydor. C'est dans cette maison d'artistes talentueux qu'il accompagne Eddy Mitchell, Maurane, Olivia Ruiz, Gérald de Palmas, Brigitte Fontaine, Ayo, Maxime Le forestier, Juliette Gréco ou, encore pour leur carrière française, 50 Cents, Eminem, Sting…

Pour autant, le jazz ne le quitte pas et ne le fera jamais. Parallèlement à ses activités nombreuses - jusqu'à être nommé Président des Éditions Universal Music en 2007, Jean-Philippe Allard produit des albums pour Charlie Haden, Lucky Peterson, et bien d'autres.

Après 10 années à la tête d’Universal Music Publishing Jean-Philippe Allard a co-fondé l’agence de management Le Bureau des artistes et récemment fondé le label Artwork Records.

Manager, éditeur, producteur... Jean-Philippe Allard est tout ça à la fois mais surtout une âme sensible et de confiance. Un homme "tellement humain, intelligent, passionné", écrit sur ses réseaux sociaux la chanteuse Vanille, à propos de lui, son manager depuis 5 ans.

Rien d’étonnant que tout au long de sa carrière il reçoive des prix, dont le Grand Prix Sacem de l’édition musicale en 2012, la Victoire d'honneur du jazz la même année, suivie du Prix Bruce Lundvall au Festival international de jazz de Montréal deux ans plus tard. Jean-Philippe Allard est « un diamant, une aiguille dans une botte de foin, quelque chose d’impossible à trouver et j'ai tellement de chance de l'avoir eu dans ma vie », témoigne la chanteuse Ayo, avec qui il collabore sur sept disques. Un véritable « ange-gardien sur terre ».

Impliqué auprès des Victoires de la Musique, des Victoires du Jazz ou du Bureau Export, Jean- Philippe Allard fut de ceux qui, à défaut d’être eux-mêmes musiciens, ont choisi d’en être les gardiens. Posté entre le public, les artistes, les producteurs et la musique elle-même, il fut tout à la fois l’étincelle et l’impulsion, celui qui écoute et stimule, gère et diffuse. Sans lui, la musique aurait probablement moins d’éclat…

« Jean-Philippe Allard, grand directeur artistique, producteur, éditeur et manager, était un homme passionné, humble, généreux et fidèle. Doté d'une grande curiosité artistique, il explorait sans cesse de nouveaux horizons. Son érudition et son sens de l'humour faisaient de lui une personnalité unique. Il aimait profondément les artistes et était aimé de tous en retour ; Juliette Gréco l'appelait tendrement "patron chéri". » Valérie Foray, éditrice, secrétaire générale de la Sacem.

Photo : Jean-Philippe Allard - Universal Music Publishing Group, Grand Prix Sacem de l'édition musicale 2012 (c) Marc Chesneau/Sacem