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Hommage
Paul Lederman
Dénicheur de talents hors pair

Impresario, confident, homme d’affaires, éditeur, Paul Lederman a accompagné Claude François, Coluche et tant d’autres, les aidant à forger leur art et leur image.

Au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, le directeur artistique et imprésario Jacques Canetti avait contribué à forger le paysage de la chanson française avec talent et acuité. Quand apparurent les yéyés, Paul Lederman prit le relais dans la cour des grands découvreurs de stars. Né à Tanger le 2 mai 1940, Paul Lederman, dont le nom est généralement associé à celui de Claude François et de Coluche, est décédé le 21 juillet à Neuilly-sur-Seine. « Paul est un plombier de luxe, c’est un fabricant de tubes comme il n’y en a pas », disait de lui Thierry Le Luron, qu’il imposa quand personne ne croyait à sa réussite.

Arrivé à Marseille en 1945 avec sa famille, d’origine polonaise, il développe une exceptionnelle qualité d’écoute et de mémorisation en devenant disquaire à Versailles puis aux Puces. Curieux, à l’affut de l’air du temps, il débarque tout naturellement sur les rivages du Golf Drouot où commence à officier la Nouvelle Vague. Il repère Lucky Blondo et en fait sa première vedette avec la chanson Jolie petite Sheila.

Quand il découvre Claude François, ce dernier est encore batteur, récemment débarqué de son Egypte natale, il a enregistré sans succès un 45 Tours sous le nom de Kôkô. Bientôt signé sur les disques Fontana, il est pris en main par Paul Lederman, manager, mais pas seulement – il trouve des titres (Belles, belles, belles ou encore Si j’avais un marteau) et s’occupe de l’artiste de A à Z, des finances à la psychologie. Dans la foulée, des artistes tels que Hervé Vilard, Mike Brant, Michel Polnareff, Christophe, Michèle Torr, L’Orchestre du Splendid, Les Inconnus ou encore Thierry Le Luron vont rejoindre la « maison Lederman ».

« Mon talent, c’est de découvrir les talents avant les autres, c’est tout… Quand j’auditionne un artiste, j’essaie de regarder ce que l’œil ne peut pas voir. C’est mon côté psy », expliquait-il à Paris Match en 1997. Il ne rate donc pas l’un des talents populaires les plus marquants de la seconde moitié du 20e siècle : Coluche, croisé en 1974 au Café de la Gare. Paul Lederman est proche de ses artistes (il nommera par exemple ses deux premiers enfants Alexandre et Alexandra). Avec eux, il monte des coups de génie, comme la vraie-fausse candidature de Coluche à la présidentielle de 1981, qui lui assure une immense couverture médiatique, et le fameux « mariage » Le Luron-Coluche… De lui, la rumeur disait qu’il « aurait pu vendre un frigo à un esquimau ». Mais l’important fut le flair et surtout la manière. Coluche racontait ainsi leur première rencontre : « Il me dit 'si tu m'écoutes bien, tu vas devenir une star'. Je l'ai pris pour un dingue, mais j'ai fait comme il a dit et, quelques mois après, j'étais devenu Coluche... ».

Paul Lederman savait sentir l’époque et anticiper les envies des consommateurs. Il avait par exemple développé des lignes de produits à l’étiquette limpide : « Les meilleurs slows », « Les plus belles chansons d’amour », « Les plus grands tubes classiques ».

Paul Lederman était membre de la Sacem, en tant qu’éditeur, mais également membre en tant qu’auteur, pour sa collaboration avec le duo d’humoristes AudéYoann, découvert au début des années 2000.

Publié le 21 juillet 2024 © Bridgeman Images

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